Retours du congrès FAQSS du 4 oct. 2018

Thème du congrès : “Nouveaux risques et nouvelles organisations en structures sanitaires et médico-sociales”

Réactions de Loïc Turbel – Dirigeant de Focus Qualité

Dans notre démarche de développement de la culture de l’erreur apprenante dans les établissements sanitaires et médico sociaux, j’ai participé jeudi 4 octobre à Paris au 5ème congrès de la FAQSS (Fédération des Associations en Qualité et Sécurité en Santé) consacré aux « Nouveaux risques et nouvelles organisations en structures sanitaires et médico-sociales ». Journée dense avec un programme ambitieux par le nombre de sujets abordés : gestion des risques ; gestion des EIG et des EIAS ; table ronde sur le RGPD ; la cybersécurité ; le plan de sécurisation des établissements pour prévenir les crises…

Tout le monde s’accorde à dire que sans signalement il n’y a pas de retour d’expérience ni d’amélioration possible. La recherche d’un responsable limite voire empêche les signalements. Elle prive donc les établissements de cette source d’information qui permet d’améliorer les pratiques pour une meilleure sécurité pour le patient / résident. La marge de progrès est importante pour passer de la recherche d’un coupable, d’un responsable de la « faute » à la démarche d’analyse, de compréhension des causes … c’est à dire à la culture de l’erreur apprenante.

 Bilan du dispositif de déclaration des EIGS

Le 1er atelier était consacré au dispositif de déclaration des EIGS (dispositif articulé avec les ARS, structures d’appui et la HAS).

Où en sommes-nous 2 ans après la mise en œuvre de ce dispositif ?

  • le dispositif est en place avec une activité en progression : près de 1 800 EIGS déclarés par an environ ;
  • une large majorité d’EIGS signalés sont dans le secteur sanitaire : 80% ;
  • les signalements concernent des situations très graves : près de 60% des cas signalés avec un niveau de gravité très important (décès ou déficit permanent) ;
  • ces situations sont gérées en internes sans recours à la structure d’appui pour l’analyse approfondie (90%) ; l’équipe soignante n’est pas toujours impliquée dans l’analyse mais 94% estiment l’événement maitrisé.

Ces résultats me semblent assez paradoxaux, à savoir qu’un événement serait maitrisé sans que l’équipe soignante n’ait été impliquée. N’est-on pas en dehors de la culture de l’erreur apprenante qui est le fondement de la démarche de gestion des risques ?

Le bilan de la HAS sur le dispositif de déclaration des E.I.G. associés aux soins sur l’année 2017 sera disponible en novembre 2018.

Enquête FAQSS sur la mise en œuvre du décret pour le signalement des EIGS

En complément des échanges que nous avons pu avoir entre acteurs du sud-ouest, je vous transmets les 1ers résultats de l’enquête que la FAQSS a mené sur la mise en œuvre du décret n° 2016-1606 relatif la déclaration des événements indésirables graves associés aux soins (EIGS).

Sur 435 réponses, il ressort :

  • des ressources en qualité et gestion des risques disparates selon les établissements ;
  • une sous-déclaration des EIGS ;
  • une maturité de la culture de gestion des risques différente selon les établissements et les régions ;
  • la difficulté de réunir l’ensemble des professionnels ayant pris en charge le patient ;
  • un système compliqué ;
  • une nécessité de mener des actions d’amélioration pour favoriser le développement de l’approche systémique, de la culture positive et juste de l’erreur ;
  • une vigilance à ne pas rendre administrative la gestion des risques…

A noter, la crainte exprimée des mesures prises par l’ARS suite à un signalement, par exemple le déclenchement de visite d’inspection. Cela peut mettre en péril une véritable démarche de signalement. La culture de l’erreur apprenante est valable pour tous !

Quelques pistes d’amélioration :

  • la diffusion d’une charte de non-punition ou d’incitation à la déclaration, ce sujet a fait l’objet d’échanges lors de l’atelier organisé par Focus Qualité et le Groupe Euris le 11 septembre à Pau ;
  • la clarification des objectifs et du circuit du dispositif ;
  • le développement de l’appui et l’accompagnement à la déclaration ;
  • la limitation des inspections suite à la déclaration.

Merci à Stéphanie PEAN et Gilbert MOUNIER pour cette enquête et ces résultats.

Une confiance à retrouver

Des retours d’expérience ont montré que suite à ce décret, un climat plutôt enclin à la déclaration et l’analyse s’était transformé en climat de méfiance. Pour que cette mesure contribue à l’amélioration des pratiques au service de la sécurité des patients, un climat de confiance réciproque entre ARS, établissements de santé et professionnels de terrain doit être retrouvé et renforcé. Cela nécessite un effort de pédagogie à tous les niveaux, du top management aux professionnels de terrain.

Vers une politique de la « non-punition » ?

La matinée s’est terminée avec l’intervention de Christian Morel[1], sociologue, qui nous a fait part d’une politique radicale de certaines organisations : la non-punition, encore appelée « culture juste ». L’idée est que la non-punition est plus efficace pour lutter contre les erreurs. Principe initié dans l’aéronautique (Tiens, tiens ! Ça nous dit quelque chose… rappelons-nous les origines de la qualité dans le secteur sanitaire…).

Retours d’expérience

Soyons positifs, d’autres témoignages ont montré que le partage d’expérience est possible. Citons par exemple la plateforme de retour d’expériences en anesthésie – réanimation à partir de déclaration de presqu’accidents en péri-opératoire (www.anesthesiasafetynetwork.com).

D’autres retours d’expériences étaient présentés sous forme de posters également, dont 2 ont été primés :

  • la diffusion de la culture qualité gestion des risques par le jeu ;
  • la démarche d’amélioration continue de la Clinique La Maison de Velleda.

Autre projet qui a retenu mon attention : celui du Dr Vincent LACOSTE, chef de service des urgences du CH de Périgueux. Dans une logique de Parcours Patient et dans un contexte de désert médical, il associe télémédecine, nouvelles technologies et nouvelle organisation Pompier – Samu. Bravo à cette équipe pour une telle mise en œuvre !

Enjeux du secteur médico-social

Le secteur médico-social est bien évidemment également concerné par ces démarches. Un gros travail est en cours pour déployer ou poursuivre les démarches en cours tout en restant vigilant aux 2 impératifs présents dans les EMS : la sécurité et la qualité de vie de l’usager. Il faut saisir cette enjeu non pas comme une contrainte mais comme une opportunité de contribuer à l’amélioration du fonctionnement des établissements au quotidien.

 

Focus Qualité vous transmettra de plus amples informations sur l’ensemble des initiatives et posters présentés dans un prochain article.

Comme vous le voyez une journée très dense… dont je n’ai pas pu suivre l’intégralité, notamment l’intervention sur la visite managériale, pour cause de timing SNCF ?.

Merci aux organisateurs et à tous les intervenants pour cette très journée très riche.

 

[1] Auteur du livre « Les décisions absurdes », Opus 3, Edition Gallimard.

Retours du congrès FAQSS du 4 oct. 2018